Suite au lancement du service « gérer mes biens immobiliers en 2023, la cour des comptes vient de rendre sa copie et le cout financier et humain n’est pas négligeable d’autant plus en cette période de réduction budgétaire et de hausse d’impôts pour résorber le déficit de la France. Petit tour d’horizon et explications.
Lancé l’année dernière, le service « Gérer mes biens immobiliers » (GMBI) avait pour ambition de recueillir des données précises sur la situation des logements en France, en distinguant les résidences principales, secondaires et les logements vacants. Ce projet, qui se voulait un outil clé pour l’ajustement de la taxe d’habitation, a connu un début difficile.
Selon Olivier Touvenin, directeur du service de la gestion fiscale à Bercy, « le but n’était pas seulement de collecter des informations, mais aussi de s’assurer que les avis de taxe sur les résidences secondaires soient justes ». Toutefois, la campagne déclarative a souffert d’un taux de participation insuffisant, avec seulement 82 % des petits propriétaires ayant déclaré l’état d’occupation de leurs biens, malgré trois reports de la date limite.
Le problème était encore plus prononcé chez les grands propriétaires, comme les offices HLM, où seulement 50 % ont complété leurs déclarations. Ces lacunes dans les données ont conduit à l’émission d’avis de taxe erronés pour un nombre significatif de contribuables, exacerbant la confusion et la frustration parmi les citoyens.
Face à ces difficultés, la Direction générale des finances publiques (DGFIP) a dû intervenir rapidement pour rectifier le tir. Amélie Verdier, nouvelle directrice de la DGFIP, a annoncé que des mesures correctives avaient été mises en place, permettant de rétablir la situation pour la majorité des contribuables affectés. En 2023, plus de 600.000 contribuables ont bénéficié d’un dégrèvement suite à des avis de taxe d’habitation erronés sur des résidences secondaires, soit un nombre nettement supérieur à la moyenne des années précédentes.
Pour 2024, la DGFIP a renforcé le processus avec l’envoi de rappels automatiques et l’ajout de simplifications dans le parcours déclaratif pour les grands propriétaires. Ces ajustements semblent porter leurs fruits : « Nous enregistrons 20 % d’appels en moins par rapport à l’an dernier », a précisé Amélie Verdier, exprimant un optimisme prudent à l’approche de la nouvelle échéance déclarative.
Le système GMBI, malgré un lancement laborieux, sera une composante essentielle de la stratégie fiscale française, en particulier avec la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales mise en place par Emmanuel Macron. Les ajustements effectués par Bercy devraient permettre une meilleure gestion des données immobilières, ce qui crucial pour une taxation plus juste et équilibrée.
Peut-être avez-vous fait partie des contribuables désorientés par la déclaration des biens immobiliers de l’année 2023 sur les revenus 2022. Pour rappel, Bercy avait demandé aux 24 millions de propriétaires en France de déclarer la fonction du logement qu’ils possèdent. Ceci s’inscrivait dans la foulée de la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales. Et cela passait par une nouvelle rubrique sur le site des impôts : « Gérer mes biens immobiliers ».
Ce lancement a été marqué par une cascade de couacs : afflux de connexions, bugs informatiques… L’essai 2023 aura été tumultueux. Pour y remédier, Bercy a demandé en 2024 de déclarer seulement les changements ou modifications d’occupation de l’année précédente. Un formulaire papier a été mis à disposition pour les personnes qui le demandent.
La Cour des comptes publie ce jeudi 23 janvier 2025 un rapport sur ce service de Bercy. Le premier constat est sans appel : le côté « chaotique » de la campagne 2023 a eu des « très lourdes conséquences financières pour l’État. Le coût de cette application et des mesures d’urgence mises en place a été a minima cinq fois supérieur à celui initialement prévu ».
« Surtout, le coût des dégrèvements que l’État a dû supporter est considérable, s’élevant à 1,3 milliard d’euros » poursuit le rapport. Cette somme correspond aux annulations d’impôts causées par 50 % d’erreurs supplémentaires sur les résidences secondaires.
La Cour des comptes reconnaît que la mise en place s’est faite « dans un calendrier contraint. » Le rapport note également qu’il reste du travail « pour fiabiliser les données foncières, actualiser les informations portant sur les logements et finaliser l’automatisation du recouvrement des impôts fonciers ». Les sages de la rue Cambon projettent que : « la connaissance des loyers perçus par les propriétaires (rendue obligatoire par leur déclaration), devrait permettre la réforme attendue de la fiscalité directe locale ».
La déclaration GMBI entraîne une fatigue importante au sein des Finances publiques en raison de la dématérialisation et du manque d’effectifs. Les syndicats expriment leur préoccupation et demandent des mesures concrètes.
Le syndicat Solidaires finances publiques a récemment tiré la sonnette d’alarme en déclarant que les agents sont épuisés et débordés par la situation.
Depuis cette année, tous les propriétaires d’appartements ou de maisons, au nombre de 34 millions, sont tenus de remplir une nouvelle déclaration obligatoire. Dans le cas où cette obligation serait oubliée, une amende forfaitaire de 150 euros par bien pourrait être imposée, comme l’a précédemment annoncé le fisc.
Cependant, cette nouvelle procédure de déclaration, qui doit être effectuée via le service Gérer mes biens immobiliers (GMBI), a engendré une charge de travail considérable supplémentaire pour les agents des finances publiques.
Selon Anne Guyot Welke, secrétaire générale du syndicat Solidaires Finances Publiques, moins de 60 % des déclarations ont été soumises. Elle estime qu’il manque encore entre 10 et 12 millions de déclarations à l’appel. Face à ce manque, l’administration a décidé de repousser la date limite, initialement fixée au 30 juin, au 31 juillet 2023.
Selon la secrétaire générale, la situation actuelle aux Finances publiques est décrite comme étant « extrêmement préoccupante ». Elle a informé le directeur général, Jérôme Fournel, de cette situation qui, selon le syndicat, est causée par « les multiples rappels du service GMBI et la menace d’une amende ».
Le syndicat souligne principalement les lacunes de planification de cette campagne par la direction, en raison de son chevauchement direct avec la période de déclaration de l’impôt sur le revenu 2023. Selon Anne Guyot Welke, cette situation « surcharge les agents qui doivent gérer les deux simultanément ».
Un exemple concret est donné par le syndicat, qui souligne l’absence d’accusé de réception après avoir effectué la déclaration GMBI, ce qui engendre des inquiétudes pour les contribuables, ainsi qu’une perte de temps au téléphone ou en personne pour les agents. La secrétaire générale fait remarquer que « la menace d’une amende rend les utilisateurs très agressifs ».
Le syndicat souligne que la dématérialisation excessive a entraîné une charge de travail supplémentaire. Selon eux, ils ont alerté à plusieurs reprises, dès novembre 2020, que l’administration avait fait le choix d’une campagne entièrement dématérialisée, ce qui ne manquerait pas de poser d’importants problèmes pour nos concitoyens et de mettre les services dans une situation ingérable. Malheureusement, ces préoccupations se sont concrétisées.
« La dématérialisation, initialement destinée à simplifier les tâches, a conduit à la suppression de 2000 postes (également motivée par la disparition de la taxe d’habitation). Cependant, dans cette situation, nous aurions bien besoin de 2000 personnes supplémentaires », déplore-t-elle.
De plus, Anne Guyot Welke souligne que « nous recevons encore entre 3 et 3,5 millions de déclarations papier pour la campagne d’impôt sur le revenu », ce qui prouve, s’il en était besoin, que la dématérialisation ne fait pas l’unanimité.
Selon des sources internes, il est prévu de renforcer les effectifs avec des vacataires pour la campagne des avis d’imposition qui débutera à la mi-août.
Cependant, cela signifie encore trois mois dans ces conditions. Anne Guyot Welke soupire en disant : « On va devoir tenir jusque-là », tout en demandant une anticipation plus importante à l’avenir et « l’arrêt des suppressions d’emploi ». Elle s’inquiète en affirmant : « On pousse les collègues à bout, et cela mécontente une partie de la population. C’est ce que le service public ne devrait jamais devenir ».